OK.
Je suis partie et ensuite ?
Ensuite, je suis incapable de retourner d'où je suis partie.
Je dois continuer ma nouvelle route. Aller de l'avant.
J'assume.
A mort.
En fait non bien sûr. Et gérer le regard des autres est au-dessus de mes forces. Prise entre deux feux, incapable de plus faire aucun projet, je me demandais quoi faire après... où aller ensuite... Je ne me sentais pas la force de revoir mon ancienne vie, il me fallait de la nouveauté. Pas seulement pour me prouver que j'étais partie pour quelque chose mais aussi et surtout parce que je n'osais pas affronter tout ce à quoi je venais de renoncer. Pas la force de me retourner ni envie de me poser les questions qui vont immanquablement m'assaillir si je regarde en arrière et encore moins de laisser la place à quelque doute que ce soit.
J'évitais soigneusement de rentrer chez moi ou de me mettre dans quelque situation qui puisse me rappeler l'avant. Puisque j'ai la trouille, je vais aller découvrir des lieux inconnus. Nouveaux. Ne représentant pas de souvenir commun. Qui n'appartiendront qu'à moi.
Je commence par la Bretagne. Sur un coup de tête, j'accepte une invitation d'une inconnue à aller profiter du festival étonnants voyageurs à Saint-Malo. Cette invitation a le double avantage de me permettre de me commencer à me réapproprier le bookcrossing et de me plonger dans un univers inconnu. La Bretagne pour moi, c'était la douce de l'Ouest, les fées, les côtés découpées, les embruns, les vacances dont je rêvais quand j'étais petite et que j'étais forcée d'aller voir ma grand-mère en Italie.
J'ai passé un moment inoubliable. Aussitôt arrivée j'ai plongé mes pieds dans l'eau. Profitant de la tranquillité de l'instant, j'ai arpenté les allées du festival dans le papotis naturel dont nous sommes capables, cette quasi-inconnue et moi. Elle m'a offert un mini-guide que je garde précieusement. comme un symbôle. J'ai aussi vu les fossettes de mon amie. Et surtout, j'ai rencontré 2 merveilleuses personnes. Que j'ai aimées instantanément. Avec qui je me sens libre de me taire, de dormir dans la voiture, de me marrer de leurs blagues, de me servir du thé dans leurs placards. Des gens précieux qui m'ont accueillie par tous les temps depuis et qui m'ont fait aimer la Bretagne comme une sorte de maison secondaire, de famille-amie.
La Bretagne désormais, c'est tout ce que c'était avant bien sûr. Mais c'est aussi les moules de Cancale, les routes de campagne à l'arrière de la voiture, le soleil couchant sur les marais salants, les fleurs sur la table de nuit, le caramel au beurre salé, la tenue bretonne des parisiens, les mystères des siècles passés racontés avec passion, les calembours, l'odeur de la mer, les pieds dans l'eau en février...
La Bretagne est un peu comme ma nouvelle vie au fond. Quand on regarde par la fenêtre et qu'on voit les nuages qui menacent, on a l'impression que ça va être une journée toute bien pourrie et foutue. Mais en fait, elle réserve de nombreuses surprises. Le soleil peut apparaître à tout moment. C'est changeant, chaotique mais délicieusement surprenant. Fait d'émotions fortes, de claques et puis aussi de douceur, de moments doudous et de rêveries induites par les mystères du passé enfoui ressurgissant à tout moment au coin d'une promenade. C'est la campagne de mon enfance et la mer que j'aime profondément. C'est vous deux que j'aime si fort même si je ne le dis jamais. C'est toi aussi même si on te retrouvera dans un autre billet.