Il y a tout d'abord les arrivées, échelonnées sur toute la matinée. Les pseudo « oh là c'était atroce ce matin » alors qu'ils vivent à 20 minutes à pied ; les qui en profitent pour partir de chez eux encore plus tard que d'habitude et qui donc apparaissent au boulot à des heures indues ; les qui sont des rescapés de l'enfer, levés à 5h pour être au bureau à 8h comme d'hab' et qui le font bien savoir ; les qui ont les yeux très cernés mais ne disent rien parce qu'ils ne vont pas s'épancher toute la journée sur le sujet, les qui font n'importe quoi pour venir travailler (genre louer un chameau, venir de Cergy à Paris à cloche-pied, s'essayer au freebord sur le périph'…) et avoir ainsi l'air de vrais gens motivés, eux…
Il y a ensuite le débriefing du « C'était comment pour toi, ce matin ? » Comment vous dire… après une semaine de grève, on a -à peu près- fait le tour de tous les collègues, on sait donc qui vient désormais en voiture, qui prend le train plus tard, qui marche, qui a sorti son vélo… A J+7 après le début de la grève, donc, on n'a théoriquement plus tellement besoin de perdre 10 minutes par bureau pour se renseigner sur le combien c'était compliqué de venir travailler malgré les éléments extérieurs déchaînés.
Il y a après ça l'heure du déjeuner. « Oh ben déjà midi ? J'ai même pas eu le temps de regarder mes mails perso ni de faire un tour sur mes sites porno d'info préférés… » Pour sûr, avec tout juste une heure et demie de présence le matin, le temps file vite… « C'est pô grave, je ferai ça cet après-midi. »
Parce que oui, il y a aussi l'après-midi. Qui commence donc par une prise de connaissance du travail à faire, puis un petit coup d'œil sur les prévisions de trafic sur le site qui va bien et tourne vite au sondage façon « Et sur ta ligne, c'est très perturbé pour rentrer ? »
Il y a enfin l'heure du goûter départ qui commence dès 16h. Il faut les comprendre : il y a la cohue, les embouteillages, la pluie, le mal aux dents… tout un tas de problèmes à éviter si c'est possible. Donc on préfère partir un peu tôt au cas où…
Je vous jure, depuis une semaine, j'ai l'impression de bosser à l'hospice au milieu de petits vieux qui s'inquiètent tous du transit intestinal des voisins en espérant que ces derniers posent à leur tour ZE question « et pour toi, c'est comment ? »
NB : j'arrive pour ma part à la même heure que d'habitude à quelque chose près (entre 10 heures moins le quart et dix heures et demie) et pars quand je me rends compte que je suis la dernière ou presque : hier, il était 17h45 et il n'y avait plus PERSONNE… Donc pour moi aussi, grève = beaucoup moins d'heures de présence !